LABRY, 1561 jours d'occupation 14-18


 

Occupation labry

Labry, village coupé du reste du pays, occupé par les Allemands, bombardé par les alliés, à 20 km de la frontière, et 20 km du front. Durant la Grande Guerre, Labry a vécu une histoire particulière, un pan méconnu qu’Eric Gangloff, enfant du pays, s’est évertué à raconter dans son dernier ouvrage : « Labry, 1914-18, entre front et frontière », paru aux Éditions Serpenoise.

En quoi l’histoire du village durant la Grande Guerre est-elle si exceptionnelle ?

Eric GANGLOFF : « Tout d’abord parce que Labry a été occupé par les Allemands, le 6 août 1914, soit seulement trois jours après la déclaration de guerre. Et parce qu’il a été libéré le 17 novembre 1918, soit six jours après l’Armistice, au terme de 1 561 jours de présence allemande. Un record dramatique ! »

Le premier officier français tué durant la Première Guerre mondiale serait tombé à Labry…

« Officiellement, oui. Le lieutenant Maurice Drieux a trouvé la mort au combat du Tremblois, le 6 août 1914. Son portrait est accroché à l’école de Saint-Cyr. Il est sorti de l’École spéciale militaire avec le grade de sous-lieutenant en 1904. Nommé lieutenant en 1906, il a rejoint le 16e Bataillon de chasseurs à pied en 1909. Il s’est marié le 15 juillet 1914. Trois semaines plus tard, il était mort ! »

Vous racontez l’affaire incroyable d’un aviateur américain abattu le 18 septembre 1918 à Labry, et dont le corps a été recherché par sa mère durant trois ans. Comment avez-vous retracé cette histoire ?

« Je suis ami avec le descendant des anciens seigneurs de Labry, M. Olry. Un jour, ce dernier m’a ouvert les archives de la famille et je suis tombé sur un document intéressant, un acte de cession d’un terrain de la Famille Olry à la famille Tyler, résidant aux Etats-Unis. Sur ce terrain, que je connaissais, il y avait une simple croix métallique. Il s’agissait de l’endroit ou avait été descendu un pilote américain, John Tyler, le 18 septembre 1918. J’ai alors écrit aux Archives militaires américaines à Washington pour en savoir davantage. À ma grande surprise, elles m’ont renvoyé un dossier d’une centaine de pages et je me suis vite aperçu que ce soldat avait une histoire incroyable.

Entre 1918 et 1921, sa mère, May Tyler, a remué ciel et terre pour retrouver le corps de son fils. De New York, elle a sonné à toutes les portes, engagé des enquêteurs privés pour localiser et faire rapatrier la dépouille de son fils. Enfin, en avril 1921, le corps de John Tyler est conduit au port belge d’Anvers. Le 23 mai, le navire Cambrai appareille pour le port d’Hoboken, dans le New Jersey, et le 14 juin, John Tyler rejoint le cimetière de Brooklyn où il repose désormais. »

Qu’est devenue la croix métallique d’où est partie cette histoire ?

« Elle existe toujours. Et en creusant le sol pour la restaurer, on a retrouvé la plaque militaire de John Tyler qui confirme les faits. Il m’a fallu une dizaine d’années pour sortir cet ouvrage. Ce fut un véritable boulot de détective. »

 

« Labry, 1914-18, entre front et frontière », Ed. Serpenoise. 20 €.         

06/2024

 

Date de dernière mise à jour : 01/06/2024