Le terrain oublié de Briey
Un terrain d’aviation oublié à Briey
Réalisé avant la Grande Guerre pour l’armée française, il fit le bonheur… de l’occupant allemand !
Retour sur l’existence éphémère d’un terrain d’aviation à Briey dans le secteur de Sarre-l’Evêque.
Le Républicain Lorrain - 03 août 2016
Dans leurs recherches minutieuses sur cette période précédant le premier conflit mondial, Roger Martinois
et les membres du CPHJ, Cercle pour la promotion de l’histoire de Jœuf, ont mis en exergue l’engouement
immense pour l’aviation dans le pays. Une fièvre à l’origine de la naissance de nombreuses "stations
d’atterrissage" dont celle de Briey, aujourd’hui tombée dans l’oubli. L’avènement des vols motorisés
intéresse au plus haut point l’armée française. Le processus de création des premiers terrains d’aviation
s’oriente ainsi vers l’aéronautique militaire. Souvent impulsées par les journaux, des souscriptions sont
lancées. Elles doivent permettre à la "5e armée" de disposer davantage d’appareils et de terrains
d’atterrissage répartis sur tout le territoire, principalement dans les régions frontalières.
Leur étendue, suffisamment grande, contribuera aux vols d’instruction et d’entraînement des pilotes.
L’appel au patriotisme permet de voir fleurir les dons pour la construction d’aéroplanes et de terrains.
Les quotidiens affichent les listes de donateurs.
Deux ans de patience
La réalisation d’une station d’atterrissage à Briey, sous-préfecture toute proche de la frontière avec
l’Empire allemand de Guillaume II, va nécessiter deux années de démarches et de formalités.
Au printemps 1912, la Lorraine ne possède qu’un modeste abri à Varangéville pour accueillir des
aéroplanes. La genèse de l’aménagement du terrain et d’un vaste hangar implantés à Briey-les-Hauts,
lieu-dit "Sarre-l’Evêque", démarre par un courrier du sénateur Emile Reymond, devenu président
du Comité national pour l’aviation militaire, auprès du maire de Briey. Il envisage la création d’une
station dans ce secteur frontalier. Après les élections municipales du printemps, le maire, Ferdinand
Watrin, propose un emplacement situé à l’Ouest de la ville, d’une superficie de 8 hectares, distant
d’un kilomètre du centre briotin, à l’angle des routes menant à Verdun et Longwy. Aux abords
immédiats de la future Clinique des mines et de la métallurgie, dont le chantier va démarrer à
l’automne 1912. Le terrain, parc à bestiaux d’exploitants agricoles de Lantéfontaine, propriété des
consorts Godfrin, leur sera loué à l’année. Louis Boninsegna, entrepreneur briotin, est chargé de la
construction du hangar, 400 m² et 4,50 m de haut, en grande partie financé par le Comité national
pour l’aviation militaire, avec une participation de la ville.
Ce hangar est achevé le samedi 14 mars 1914. Le lendemain, en matinée, deux aéroplanes de la station
de Verdun se posent à Briey. L’inauguration officielle, « une réception grandiose au souvenir impérissable »
aura lieu avec faste le dimanche 26 juillet, en présence des députés Albert Lebrun et François de Wendel.
La Flugplatz Briey
Après la déclaration de guerre, la sous-préfecture du Pays-Haut tombe rapidement sous la botte allemande.
En fin d’année 1914, elle est devenue une ville de garnison « non pas noire, mais grise de soldats de toutes
les armes et de toutes les régions de l’Allemagne ».
Les premiers aviateurs s’installent au début du mois de décembre. D’immenses tentes servant d’abris pour
les avions et des baraquements pour le personnel au sol vont s’ajouter au hangar. En août 1915, une
escadrille bavaroise occupe la "Flugplatz Briey". Deux autres escadrilles prendront le relais après 1916.
Au lendemain de l’Armistice du 11 novembre 1918, les derniers aviateurs allemands de Briey
s’envoleront vers la Bavière.
En 1921, Henri Lorentz et la nouvelle municipalité indemniseront les consorts Godfrin qui n’ont
pas touché les loyers de leur terrain depuis six ans. Cette mésaventure incite les propriétaires à
vendre ce bien d’un rapport incertain ! La ville va s’employer à rentabiliser le site. Le hangar devient
lieu de stockage d’objets mobiliers et matériels. Sous l’appellation "terrain du château d’eau",
il accueille les footballeurs et les gymnases du patronage "Les gas du Woigot", lointain ancêtre
de l’Union sportive briotine.