Accroissement des effectifs dans l'Est.

L'Est Républicain Lundi 22 Septembre 1913

 

Les Casernes de Labry

Elles seront prêtes pour octobre. — Le logement des ménages

 

Les casernes de Labry , et non Conflans (1), comme on s'obstine à l'écrire, seront-elles prêtes le 1er octobre, date à laquelle

elles doivent être livrées à l'autorité militaire, pour recevoir le beau 16°bataillon de chasseurs à pied que la confiance du

gouvernement envoie à ce poste d'honneur à l'extrême frontière, face à Saint-Privat, dont l'anniversaire fut commémoré

ces jours derniers avec un superbe enthousiasme, une admirable foi patriotique ?

Telle est la question qu'on se pose à Lille, garnison actuelle du futur bataillon de Labry , et aussi dans la région de Briey.

Chargé par le directeur de 1' « Est républicain » de répondre à cette question, je me rendis il y a quelques jours à Labry.

Je fis là une très intéressante excursion et j'en rapportai la conviction que ; les nouvelles casernes pourront être occupées

le 1er octobre.

Les entrepreneurs, MM. Ballot et Pellerin, dont la réputation me dispense de tout éloge, qui d'ailleurs froisserait leur

modestie, ont conduit les importants travaux qui leurs avaient été confiés avec leur activité habituelle.

M. Ballot surveille lui-même les 460 ouvriers appartenant à toutes les professions du bâtiment occupés sur les vastes chan-

tiers. Sous son intelligente direction, une escouade de dévoués surveillants stimule les activités, et les énergies.

En outre de ces 460 travailleurs, la maison Ballot-Pellerin emploie encore une centaine d'ouvriers dans ses carrières d'Hatri-

ze et Valleroy, d'où est extraite la pierre servant a la construction des casernes de Labry . Depuis ma visite du mois de juin,

beaucoup de besogne a été faite, il y en aurait davantage encore si la fâcheuse pluie n'était venue contrarier entrepreneurs

et ouvriers pendant plus de trois semaines.

Mais le beau temps est revenu et les chantiers ont repris leur activité des premiers jours. MM. Ballot et Pcllerin ont eu le

grand avantage de ne pas manquer de bras, ils ont toujours eu autant d'ouvriers qu'ils avaient besoin. Ceux-ci sont, bien

payés, des cantines ont été construites à leur intention, dans lesquelles ils trouvent, à de bonnes conditions, nourriture et

logement. Les entrepreneurs des casernes de Labry ont d'ailleurs une excellente méthode, consistant à voyager avec un

solide noyau de bons ouvriers, sur lesquels ils sont certains de pouvoir compter. « La construction des casernes de Labry 

est pour nous un travail normal, que nous exécuterons dans les conditions normales », nous disait M. Ballot, lors de notre

première visite. C'était exact.

Les entrepreneurs ont organisé un service de transport automobile pour amener sur les chantiers les matériaux nécessai-

res. Ils ont fait dans la rivière l'Orne, qui passe à 1.500 mètres une prise d'eau,qu'une machine élévatoire envoie sur les

chantiers, ils ont établi une ligne électrique qui leur permet de travailler de nuit, si besoin est. Aussi les travaux sont très

avancés, comme nous l'écrivons ci-dessus.

Le casernement de Labry se présente sous la forme d'un vaste rectangle, dont les côtés sont constitués par les 6 pavillons

destinés au logement des compagnies, les extrémités par le corps de garde, la salle d'honneur et le pavillon de la section

hors-rang.

En arrière, les latrines, cuisines, lavoirs, séchoirs, infirmerie, etc. Pas très loin, dans la plaine, le champ de manoeuvres et

le champ de tir s'étendent au pied d'un petit bois.

L'emplacement est très heureusement choisi. Des fenêtres du quartier on jouit d'une vue splendide.

D'un côté ce sont les côtes de la Meuse, qui s'étagent à perte de vue, de l'autre on découvre la frontière, que nos petits chas-

seurs viennent garder. Dans le fond, la gare de Conflans-Jarny, avec son va-et-vient ininterrompu de trains de voyageurs et

de marchandises.

Voici où en sont aujourd'hui les travaux : les trois pavillons de gauche sont couverts ainsi que l'un des pavillons d'entrée, la

section hors-rang, la cantine, les cuisines de trois compagnies et l'infirmerie.

Les plâtriers ont pris possession de ces divers locaux.

Le ler septembre arrivèrent les électriciens, qui procèdent à l'installation de l'éclairage électrique dans les divers bâtiments

constituant le quartier de Labry .

Les cimentiers travaillent à la construction du vaste réservoir, en ciment armé, devant contenir l'eau destinée à l'alimen-

tation de la garnison. Cette eau proviendra d'un puits foré à 90 mètres de profondeur, non loin du quartier par MM. Pellerin

et Ballot. L'eau de Labry est d'excellente qualité et assez abondante pour alimenter, non seulement la garnison, mais encore

la localité toute entière. La nappe a, paraît-il, une profondeur de 50 mètres.

Pour le premier octobre, MM. Ballot et Pellerin livreront, à moins de circonstances ne pouvant être prévues, trois pavillons

de compagnie, et les divers bâtiments nécessaires aux différents services d'un demi-bataillon

Somme toute, ils mettront à cette date, à la disposition du génie militaire, tout ce qui devait être prêt, même davantage. Ils

espèrent bien que tout sera fini pour le 1er janvier 1914 et du train dont vont les choses, il doit en être ainsi.

Les maçons activent la construction des trois pavillons restant à édifier, l'un est déjà à hauteur du premier étage, le second

suit de près ,le dernier est sorti de terre. Il ne reste à amorcer que le mur d'enceinte, terreur des chasseurs noctambules.

Si tout est prêt pour recevoir trois compagnies du 16e chasseurs au 1er octobre, en est-il de même en ce qui concerne les

officiers et sous-officiers mariés ?

Notre franchise nous oblige à répondre non, bien qu'un sérieux effort ait été fait dans ce sens depuis notre dernière visite

à Labry .

Contrairement à ce qui avait été dit, le génie militaire ne s'occupe pas du logement des ménages, estimant sans doute que le

logement des hommes lui donne assez de mal.

Fort heureusement, il existe à Labry un homme de décision, M. le comte de Labry , grand propriétaire foncier.

M. le comte de Labry procéda au lotisement de deux terrains lui appartenant, situés de chaque côté de la route de Labry à

Conflans, en bordure de laquelle s'élèvent les casernes.

Du terrain longeant le futur mur d'enceinte, il fit faire 157 lots ; de celui se trouvant de l'autre côté de la route, 20 lots.

Dans le premier, il percera deux rues, dans le second cinq rues, déjà pourvues de noms rappelant des gloires militaires

contemporaines.

Et, pour amorcer de nouveaux quartiers, il chargea MM. Pellerin et Ballot de construire des logements destinés aux sous-

officiers et officiers du 16e chasseur à pied.

Dans la partie supérieure du terrain longeant les casernes, le châtelain de Labry fait édifier quatre maisons pouvant

abriter huit ménages de sous-officiers. Très confortables, coquets même, seront ces logements.

Malheureusement ils ne pourront être occupés au 1er octobre, ceci parce que les entrepreneurs furent tardivement chargés

de leur construction. M. Ballot va s'efforcer de rattraper le temps perdu et il espère pouvoir livrer ces immeubles pour

le 1er novembre.

De l'autre côté de la route, quatre maisons sont en construction, trois seront divisées en deux logements, la quatrième

n'abritera qu'un seul ménage.

En principe, ces logements sont destinés à des officiers. Construits selon les données les plus récentes, ils comporteront

W.-C. modernes, eau, électricité, etc.

Quatre autres immeubles sont amorcés. Actuellement, M. de Labry n'a chargé ses entrepreneurs que de la construction de

huit maisons, mais il est probable qu'il augmentera ce nombre si besoin est.

En tout cas, ce n'est pas le terrain à bâtir qui manque à proximité du quartier de Labry, et un terrain situé dans les meilleures

conditions au double point de vue hygiène et panorama.

A quel prix M. de Labry louera t-il ses immeubles aux officiers et sous-officiers du 16e ? Je ne saurais le dire, n'ayant pu

rencontrer le comte pour le lui demander. Mais ceux qui le connaissent, bien affirment que le prix des loyers sera aussi peu

élevé que possible.

M. le comte de Labry , disent-ils, a voulu simplement travailler utilement au développement de la localité dont il porte le nom.

Quant à ceux qui ne pourront obtenir un de ces logements, ils auront sans doute de la peine à s'installer, car déjà il y a pénurie

de locaux habitables, non seulement à Labry , mais encore dans les localités voisines de Conflans et Jarny.

Actuellement, il faut donner de 30 à 35 francs par mois pour un logement de trois pièces, cuisine comprise, prix qui est d'ail-

leurs courant dans les nombreuses localités industrielles du bassin de Briey-Longwy.

Les propriétaires de Jarny ne paraissent pas décidés à profiter de l'arrivée d'une troupe pour majorer les loyers. Ils ne

pourront satisfaire à toutes les demandes, voilà tout.

En résumé, certains officiers et sous-officiers mariés auront du mal à se loger à leur arrivée à Labry , mais on peut espérer

que dans quelque temps la situation changera, des constructions nouvelles devant s'élever.

En tout cas, le 16° chasseurs à pied trouvera à Labry un accueil chaleureux et sympathique, tant de la part de la population

que de la municipalité que préside un homme aussi charmant qu'actif, Mr Michel.

La commune de Labry avait ceci de commun avec de nombreux villages lorrains qu'elle n'était pas très riche. Elle a

cependant consenti de lourds sacrifices pour avoir l'honneur d'être dotée d'une garnison.

A dire vrai, c'est moins la vanité qu'une exacte compréhension du devoir patriotique qui a décidé le conseil municipal de

Labry à répondre favorablement aux demandes de l'autorité militaire.

La municipalité de Labry n'a pas attendu l'arrivée du 16° pour témoigner sa sympathie aux petits vitriers. Déjà elle a fait

auprès de la Compagnie de l'Est des démarches afin d'obtenir des communica tions plus faciles entre Conflans-Verdun-

Paris.

Geste charmant, n'est-il pas vrai, que celui de ces braves gens qui demandent à la Compagnie de faciliter aux chasseurs

du 16° les moyens de se rendre dans les villes où ils trouveront les distractions qui leur manquent ici et surtout d'aller sou-

vent voir leurs parents.

A son arrivée à Labry , le 16° sera chaleureusement accueilli par les habitants de Jarny, Conflans, Labry .

La municipalité de cette dernière commune prépare une réception dont le programme ne pourra être définitivement éta-

bli que quand seront connues la date et l'heure de l'arrivée de nos chasseurs. A Labry , le 16° chasseurs à pied trouvera de

superbes casernes, un climat sain, et une vue admirable, une ardente sympathie de la part des populations, une vive

sollicitude de la part de la municipalité. Et nous sommes persuadés qu'il ne regrettera pas trop la grande cité du Nord qu'il

doit quitter pour les « Marches de l'Est ».

                                                                                                                                                      Louis DESMONTS.

(1) voir ---> Communes ---> Labry ---> Articles de Journaux etc.

 

Date de dernière mise à jour : 08/10/2025